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tranquille dans sa place et regarder comme non avenu tout ce qui s’était passé[1].

Le semblant de rappel du comte de Montaigu n’aurait été qu’un incident sans importance si l’ambassadeur n’en avait été gravement affecté. On comprend du reste que ses lettres se ressentissent parfois des ennuis qu’il éprouvait. Il se voyait environné d′hommes indignes de sa confiance. Rousseau, outre ses malversations, espionnait son maître et altérait ses chiffres de correspondance[2]. Son successeur Henry imita ce triste exemple. (Quant au gouvernement vénitien, l’espionnage était son principal moyen d’action. Six mois après son arrivée à Venise, l’ambassadeur signalait à Amelot un fait singulier. Il avait présenté au Collège un mémoire dont il expédia un double à la cour, le jour où l’assemblée en délibérait ; la réponse ne lui fut notifiée que le lendemain, et cependant Cornaro, ministre vénitien à Versailles, eut en main une copie de cette réponse avant que le mémoire fût parvenu à Amelot[3]. Un an plus tard, le comte se plaignait de ce que le texte d’une de ses dépêches chiffrées eût été livré au chancelier de la

  1. Le chevalier annonce à son frère, le 18 août 1746, qu’il a su par le cardinal de Tencin « que M. d’Argenson ne pouvoit pas vous escrire la lettre que vous me demandiez de sa part, mais que vous pouviez vous tenir tranquille et assuré dans votre place, et regarder ce qui s’est passé comme non avenu ».
  2. Lettres de l’ambassadeur à l’abbé Alary (août 1744). — Lettres de l’ambassadeur au marquis d’Argenson (14 août 1745).
  3. Lettre de l’ambassadeur à Amelot, 22 février 1744.