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ESSAIS DE MONTAIGNE.

Si est-ce qu’encore y en a-t-il qui se sont très-bien trouvés de sortir sur la parole de l’assaillant, témoin Henri de Vaux, chevalier champenois, lequel étant assiégé dans le château de Commercy par les Anglais, Barthélemy de Bruwes, qui commandait au siége, ayant par dehors fait saper la plupart du château, si qu’il ne restait que le feu pour accabler les assiégés sous les ruines somma ledit Henri de sortir à parlementer pour son profit, comme il fit, lui quatrième ; et son évidente ruine, lui ayant été montrée à l’œil, il s’en sentit singulièrement obligé à l’ennemi, à la discrétion duquel, après qu’il se fût rendu avec sa troupe, le feu étant mis à la mine, les étançons de bois venus à faillir, le château fut emporté de fond en comble.

Je me fie aisément à la foi d’autrui ; mais malaisément le ferai-je lorsque je donnerais à juger l’avoir plutôt fait par désespoir et faute de cœur, que par franchise et fiance de sa loyauté.


CHAPITRE VI.

que l’intention juge nos actions.


La mort, dit-on, nous acquitte de toutes nos obligations. J’en sais qui l’ont pris en diverse façon. Henri septième, roi d’Angleterre, fit composition avec don Philippe, fils de l’empereur Maximilien, ou, pour le confronter plus honorablement, père de l’empereur Charles cinquième, que ledit Philippe remettrait entre ses mains le duc de Suffolk de la Rose blanche, son en-