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CHAPITRE XXI.

L’un de nos historiens grecs accuse justement son siècle de ce que les secrets de la religion chrétienne étaient épandus emmy la place, aux mains des moindres artisans, que chacun en pouvait débattre et dire selon son sens ; et que ce nous devait être grande honte, nous qui, par la grâce de Dieu, jouissons des purs mystères de la piété, de les laisser profaner en la bouche de personnes ignorantes et populaires, vu que les Gentils interdisaient à Socrate, à Platon et aux plus sages, de s’enquérir et parler des choses commises aux prêtres de Delphes ; dit aussi que les factions des princes, sur le Sujet de la théologie, sont armées, non de zèle, mais de colère ; que le zèle tient de la divine raison et justice, se conduisant ordonnément et modérément ; mais qu’il se change en haine et envie, et produit, au lieu de froment et raisin, de l’ivraie et des orties, quand il est conduit d’une passion humaine. Et justement aussi, cet autre, conseillant l’empereur Théodose, disait les disputes, n’endormir pas tant les schismes de l’Église que les éveiller et animer les hérésies ; que pourtant il fallait fuir toutes contentions et argumentations dialectiques, et se rapporter nument aux prescriptions et formules de la foi, établies par les anciens. Et l’empereur Andronicus[1], ayant rencontré en son palais des principaux hommes aux prises de parole contre Lapodius, sur un de nos points de grande importance, les tança, jusqu’à menacer de les jeter en la rivière s’ils continuaient. Les enfants et les femmes, en nos jours, régentent les hommes plus vieux et expérimentés sur les lois ecclésiastiques,

  1. Andronic Comnène.