Et de ses liures, comme d’vne pepiniere de toute espece de suffisance,
Qui quid sit pulchrum, quid turpe, quid vtile, quid non,
Plenius ac melius Chrysippo ac Crantore dicit :
Et comme dit l’autre,
A quo, ceu fonte perenni,
Vatum Pieriis labra rigantur aquis.
Et l’autre,
Adde Heliconiadum comites, quorum vnus Homerus
Astra potitus.
Et l’autre,
Cuiusque ex ore profuso
Omnis posteritas latices in carmina duxit,
Amnémque in tenues ausa est deducere riuos,
Vnius fœcunda bonis.
, C’est contre l’ordre de Nature, qu’il a faict la plus excellente
production qui puisse estre : car la naissance ordinaire des choses,
elle est imparfaicte elles s’augmentent, se fortifient par l’accroissance. L’enfance de la poësie, et de plusieurs autres sciences, il l’a
rendue meure, parfaicte, et accomplie. A cette cause le peut on
nommer le premier et dernier des poëtes, suyuant ce beau tesmoignage que l’antiquité nous a laissé de luy, que n’ayant eu nul
qu’il peust imiter auant luy, il n’a cu nul apres luy qui le peust
imiter. Ses parolles, selon Aristote, sont les seules parolles, qui
ayent mouuement et action : ce sont les seuls mots substantiels.
Alexandre le grand ayant rencontré parmy les despouïlles de Darius, vn riche coffret, ordonna qu’on le luy reseruast pour y loger
son Homere disant, que c’estoit le meilleur et plus fidelle conseiller qu’il eust en ses affaires militaires. Pour cette mesme raison
disoit Cleomenes fils d’Anaxandridas, que c’estoit le Poëte des Lacedemoniens, par ce qu’il estoit tres-bon maistre de la discipline
guerriere. Cette loüange singuliere et particuliere luy est aussi
demeurée au iugement de Plutarque, que c’est le seul autheur du
monde, qui n’a iamais soulé ne dégousté les hommes, se montrant
aux lecteurs tousiours tout autre, et fleurissant tousiours en nouuelle grace. Ce folastre d’Alcibiades, ayant demandé à vn, qui
faisoit profession des lettres, vn liure d’Homere, luy donna vn
soufflet, par ce qu’il n’en auoit point : comme qui trouueroit vn de
nos prestres sans breuiaire. Xenophanes se pleignoit vn iour à
Hieron, tyran de Syracuse, de ce qu’il estoit si pauure, qu’il n’auoit
dequoy nourrir deux seruiteurs : Et quoy, luy respondit-il, Homere
qui estoit beaucoup plus pauure que toy, en nourrit bien plus de
dix mille, tout mort qu’il est. Que n’estoit ce dire, à Panætius,
quand il nommoit Platon l’Homere des philosophes ? Outre cela,
quelle gloire se peut comparer à la sienne ? Il n’est rien qui viue en
la bouche des hommes, comme son nom et ses ouurages rien si
cogneu, et si reçeu que Troye, Helene, et ses guerres, qui ne furent à l’aduenture iamais. Nos enfans s’appellent encore des noms
qu’il forgea, il y a plus de trois mille ans. Qui ne cognoist Hector,
et Achilles ? Non seulement aucunes races particulieres, mais la