peussent estre. Voire ie fay grand doubte que Phidias ou autre excellent statuaire, aymast autant la conseruation et la durée de ses enfans naturels, comme il feroit d’vne image excellente, qu’auec long trauail et estude il auroit parfaite selon l’art. Et quant à ces passions vitieuses et furieuses, qui ont eschauffé quelque fois les peres à l’amour de leurs fillos, ou les meres enuers leurs fils, encore s’en trouue-il de pareilles en cette autre sorte de parenté. Tesmoing ce que lon recite de Pygmalion, qu’ayant basty vne statue de femme de beauté singuliere, il deuint si esperduement espris de l’amour forcené de ce sien ouurage, qu’il falut ; qu’en faueur de sa rage les Dieux la luy viuifiassent :
Tentatum mollescit ebur, posilóque rigore
Subsidit digitis.
CHAPITRE IX.
’est vne façon vitieuse de la noblesse de nostre temps, et pleine
de mollesse, de ne prendre les armes que sur le point d’vne extreme necessité : et s’en descharger aussi tost qu’il y a tant soit peu
d’apparence, que le danger soit esloigné. D’où il suruient plusieurs
desordres : car chacun criant et courant à ses armes, sur le point
de la charge, les vns sont à lacer encore leur cuirasse, que leurs
compaignons sont desia rompus. Nos peres donnoient leur salade,
leur lance, et leurs gantelets à porter, et n’abandonnoient le reste
de leur equippage, tant que la couruée duroit. Nos trouppes sont à
cette heure toutes troublées et difformes, par la confusion du bagage et des valets qui ne peuuent esloigner leurs maistres, à cause
de leurs armes. Tite Liue parlant des nostres, Intolerantissima laboris corpora vix arma humeris gerebant.Plusieurs nations vont
encore et alloient anciennement à la guerre sans se couurir : ou se
couuroient d’inutiles defences.
Alexandre le plus hazardeux Capitaine qui fut iamais, s’armoit fort rarement. Et ceux d’entre nous qui les mesprisent n’empirent pour cela de guere leur marché. S’il se voit quelqu’vn tué par le defaut d’vn harnois, il n’en est guere moindre nombre, que l’empesche-