À quoy sert l’art de cette honte virginalle ? cette froideur rassise, cette contenance seuere, cette profession d’ignorance des choses, qu’elles sçauent mieux, que nous qui les en instruisons, qu’à nous accroistre le desir de vaincre, gourmander, et souler à nostre appetit, toute cette ceremonie, et ces obstacles ? Car il y a non seulement du plaisir, mais de la gloire encore, d’affolir et desbaucher cette molle douceur, et cette pudeur infantine, et de ranger à la mercy de nostre ardeur vne grauité froide et magistrale. C’est gloire, disent-ils, de triompher de la modestie, de la chasteté, et de la temperance : et qui desconseille aux Dames, ces parties là, il les trahit, et soy-mesmes. Il faut croire que le cœur leur fremit d’effroy, que le son de nos mots blesse la pureté de leurs oreilles, qu’elles nous en haissent et s’accordent à nostre importunité d’vne force forcée. La beauté, toute puissante qu’elle est, n’a pas dequoy se faire sauourer sans cette entremise. Voyez en Italie, où il y a plus de beauté à vendre, et de la plus fine, comment il faut qu’elle cherche d’autres moyens estrangers, et d’autres arts pour se rendre aggreable : et si à la verité, quoy qu’elle face estant venale et publique, elle demeure foible et languissante. Tout ainsi que mesme en la vertu, de deux effects pareils, nous tenons neantmoins celuy-là, le plus beau et plus digne, auquel il y a plus d’empeschement et de hazard proposé.C’est vn effect de la prouidence diuine, de permettre sa saincte Église estre agitée, comme nous la voyons de tant de troubles et d’orages, pour esueiller par ce contraste les ames pies, et les r’auoir de l’oisiueté et du sommeil, où les auoit plongees vne si longue tranquillité. Si nous contrepoisons la perte que nous auons faicte, par le nombre de ceux qui se sont desuoyez, au gain qui nous vient pour nous estre remis en haleine, resuscité nostre zele et nos forces, à l’occasion de ce combat, le ne sçay si l’vtilité ne surmonte point le dommage.Nous auons pensé attacher plus ferme le nœud de nos mariages, pour auoir osté tout moyen de les dissoudre, mais d’autant s’est dépris et relasché le nœud de la volonté et de l’affection, que celuy de la contraincte s’est estrecy. Et au rebours, ce qui tint les mariages à Rome, si long temps en honneur et en seurté, fut la liberté de les rompre, qui voudroit. Ils gardoient mieux leurs femmes, d’autant qu’ils les pouuoient perdre : et en pleine licence de diuorces, il se passa cinq cens ans et plus, auant que nul s’en seruist.
À ce propos se pourroit ioindre l’opinion d’vn ancien, que les