dit : « Qui donc nous enseignera pour qui le monde a été fait ? C’est sans doute pour les êtres animés qui ont l’usage de la raison, c’est-à-dire pour les dieux et les hommes qui sont les plus parfaits de tous les êtres (Cicéron) ! » ou plutôt pourrons-nous jamais assez bafouer son impudence, d’accoupler ainsi les dieux et les hommes ? Qu’a donc alors en lui le pauvret, qui puisse lui valoir un tel avantage ?
S’il est vrai que les astres ont de l’influence sur sa destinée, peut-il dire qu’il commande quand il ne fait qu’obéir. — Considérons la vie incorruptible des corps célestes, leur beauté, leur grandeur, leur mouvement continu réglé avec tant de précision : « Quand on contemple au-dessus de sa tête les voûtes immenses du monde et les astres brillants dont elles sont constellées, et qu’on vient à réfléchir sur les révolutions de la terre et du soleil (Lucrèce) » ; considérons la domination et la puissance que ces corps exercent non seulement sur nos existences et les fluctuations de notre destinée, « car toutes les actions et la vie des hommes dépendent de l’influence des astres (Manilius) », mais même sur nos penchants, nos raisonnements, nos volontés qu’ils gouvernent, poussent et agitent suivant que cette influence se fait sentir dans un sens ou dans un autre, ainsi que notre raison l’établit et nous le montre : « Elle reconnaît que ces astres si éloignés, ont sur les hommes un secret empire, que des lois fixes règlent les mouvements périodiques de l’univers et que le cours des destinées est déterminé par des signes certains (Manilius) » ; — si non seulement l’homme isolé, non seulement les rois, mais même les royaumes, les empires, tout en ce bas monde subit l’action des moindres mouvements célestes : « Les plus grandes révolutions sont produites par ces mouvements insensibles, tant sont hautes ces lois qui commandent aux rois eux-mêmes (Manilius) » ; — si notre vertu, nos vices, notre capacité, notre science, cette intuition même que nous avons de l’influence qu’exercent les astres, et cette compréhension des relations qui existent entre eux et nous, nous viennent d’eux et sont des effets de leur action, ainsi que nous sommes portés à le croire : « L’un, furieux d’amour, traverse la mer, et va renverser Troie ; l’autre est destiné par le sort à donner des lois ; ici des enfants tuent leurs pères, là des pères tuent leurs enfants, ou ce sont des frères qui s’arment contre leurs frères et s’égorgent entre eux. Il ne faut pas en accuser les hommes ; la destinée, plus forte qu’eux, les entraine, les force à se déchirer et à se punir ainsi de leurs propres mains ; tout cela devait arriver, ainsi l’a voulu le destin (Manilius) » ; — si enfin c’est au ciel que nous devons cette parcelle de raison que nous avons, comment peut-elle nous faire son égal ? comment pouvons-nous soumettre à notre science son principe et les conditions dans lesquelles il existe ?
Que savons-nous de ces astres, sur quoi s’appuient les suppositions que nous émettons à leur sujet ? — Tout ce que nous voyons de ces corps, est pour nous un sujet d’étonnement : « Quels instruments, quels leviers, quelles machines, quels ouvriers ont élevé un si vaste édifice (Cicéron) ? » Pourquoi admettons-nous