iusques après sa mort l’execution de sa desloyauté : non plus que le masson de Hérodote, lequel ayant loyallement conserué durant sa vie le secret des thresors du Roy d’Égypte son maistre, mourant les descouurit à ses enfans.I’ay veu plusieurs de mon temps conuaincus par leur conscience retenir de l’autruy, se disposer à y satisfaire par leur testament, et après leur decés. Ils ne font rien que vaille. Ny de prendre terme à chose si pressante, ny de vouloir restablir vne iniure auec si peu de leur ressentiment et interest. Ils doiuent du plus leur. Et d’autant qu’ils payent plus poisamment, et incommodéement : d’autant en est leur satisfaction plus iuste et méritoire. La pénitence demande à charger. Ceux la font encore pis, qui reseruent la déclaration de quelque haineuse volonté enuers le proche à leur dernière volonté, l’ayants cachée pendant la vie. Et monstrent auoir peu de soin du propre honneur, irritans l’offencé à l’encontre de leur mémoire : et moins de leur conscience, n’ayants pour le respect de la mort mesme, sceu faire mourir leur maltalent : et en estendant la vie outre la leur. Iniques iuges, qui remettent à iuger alors qu’ils n’ont plus cognoissance de cause. Ie me garderay, si ie puis, que ma mort die chose, que ma vie n’ayt premièrement dit et apertement.
CHAPITRE VIII.
omme nous voyons des terres oysiues, si elles sont grasses et fertilles,
foisonner en cent mille sortes d’herbes sauuages et inutiles
et que pour les tenir en office, il les faut assubiectir et employer à
certaines semences, pour nostre seruice. Et comme nous voyons,
que les femmes produisent bien toutes seules, des amas et pièces
de chair informes, mais que pour faire vne génération bonne et
naturelle, il les faut embesongner d’vne autre semence : ainsin est-il
des esprits ; si on ne les occupe à certain subiect, qui les bride
et contraigne, ils se iettent desreiglez, par-cy par-là, dans le vague
champ des imaginations.