Ne pourront plus fournir à mon tourment.
C’est mon espoir, si ie meurs en aymant,
A donc, ie croy, failliray-ie à mes peines.
Lors que lasse est, de me lasser ma peine,
Amour d’vn bien mon mal refreschissant,
Flate au cœur mort ma playe languissant,
Nourrit mon mal, et luy faict prendre alaine,
Lors ie conçoy quelque espérance vaine :
Mais aussi tost, ce dur tyran, s’il sent
Que mon espoir se renforce en croissant,
Pour l’estoufer, cent tourmens il m’ameine
Encor tous frez : lors ie me veois blasmant
D’auoir esté rebelle à mon tourmant.
Viue le mal, ô dieux, qui me deuore,
Viue à son gré mon tourmant rigoureux.
Ô bien-heureux, et bien-heureux encore
Qui sans relasche est tousiours mal’heureux.
Si contre amour ie n’ay autre deffence
le m’en plaindray, mes vers le maudiront,
Et après moy les roches rediront
Le tort qu’il faict à ma dure constance.
Puis que de luy i’endure cette ofïence,
Au moings tout haut, mes rithmes le diront,
Et nos neueus, alors qu’ils me liront.
En l’outrageant, m’en feront la vengeance.
Ayant perdu tout l’aise que i’auois,
Ce sera peu que de perdre ma voix.
S’on sçait l’aigreur de mon triste soucy.
Et fut celuy qui m’a faict cette playe,
Il en aura, pour si dur cœur qu’il aye,
Quelque pitié, mais non pas de mercy.
Ia reluisoit la benoiste iournée
Que la nature au monde te deuoit,
Quand des thresors qu’elle te reseruoit
Sa grande clef, te fust abandonnée.