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Peu de vaisseaux fondent de leur propre poix et sans violence estrangere. Or tournons les yeux par tout : tout crolle autour de nous ; en tous les grands estats, soit de Chrestienté, soit d’ailleurs, que nous cognoissons, regardez y : vous y trouverez une evidente menasse de changement et de ruyne ;

Et sua sunt illis incommoda, parque per omnes
Tempestas.

Les astrologues ont beau jeu à nous advertir, comme ils font, de grandes alterations et mutations prochaines : leurs devinations sont presentes et palpables, il ne faut pas aller au ciel pour cela. Nous n’avons pas seulement à tirer consolation de cette société universelle de mal et de menasse, mais encores quelque esperance pour la durée de nostre estat ; d’autant que naturellement rien ne tombe là où tout tombe. La maladie universelle est la santé particuliere ; la conformité est qualité ennemie à la dissolution. Pour moy, je n’en entre point au desespoir, et me semble y voir des routes à nous sauver ;

------ Deus haec fortasse benigna
Reducet in sedem vice.

Qui sçait si Dieu voudra qu’il en advienne comme des corps qui se purgent et remettent en meilleur estat par longues et griefves maladies, lesquelles leur rendent une santé plus entiere et plus nette que celle qu’elles leur avoient osté ? Ce qui me poise le plus, c’est qu’à compter les simptomes de nostre mal, j’en vois autant de naturels et de ceux que le ciel nous envoye et proprement siens, que de ceux que nostre desreiglement et l’imprudence humaine y conferent. Il semble que les astres mesme ordonnent que nous avons assez duré outre les termes ordinaires. Et cecy aussi me poise, que le plus voysin mal qui nous menace n’est pas alteration en la masse entiere et solide, mais sa dissipation et divulsion l’extreme de noz craintes. Encores en ces ravasseries icy crains-je la trahison de ma memoire, que par inadvertance elle m’aye faict enregistrer une chose deux fois. Je hay à me reconnoistre, et ne retaste jamais qu’envis ce qui m’est une fois eschappé. Or je n’apporte icy rien de nouvel apprentissage. Ce sont imaginations communes : les ayant à