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fabliau lxxiii

Que li aube esclarcist et point,
C’on les retrouva en tel point
Comme ot fait le jour de devant,
Droit ainssi qu’à soleil levant.
265Chascuns qui mieus mieus y acourt,
Mais assez en brief terme et court.
Si bien la chose ala et vint
Que cil meïsmes i sourvint
Qui le soir les out[1] enterrées.
270Et, quant ilec les a trouvées.
De grans merveilles s’en seigna.
Et dist : « Dyables les engigna
Qui les a raportées ci.
Oiés, seigneur, pour Dieu merci,
275Comment sont eles revenues.
En terre les mis[2] toutes nues
L’une seur l’autre en une fosse ;
Foi que je doi au cors saint Josse,
Elles ont lesdeables es cors.
280Voiés les, à chascun des cors,
Comme elles sont de vers chargies,
Enterrées et demengies,
Les cors noirs et delapidés :
C’est d’eles veoir grans pitez ;
285Touz li cuers du ventre m’en tremble. »
Ainsi qu’il parloient ensemble
De l’aventure desguisée,
S’est dame Tifaigne escriée,
Qui revint .I. poi en memoire[3] :
290« Druin, raportez nous à boire.

  1. 269 — * out ; ms., ont.
  2. 276 — * mis ; ms., mist.
  3. 289 — * memoire ; ms., mimoire.

    La miniature de ce fabliau (fol. 88 vo), à fond quadrillé, représente une table bien servie, et derrière, les trois dames debout et buvant. Elles ont de longues robes flottantes et de curieux bonnets à la phrygienne, dont la longue pointe dressée est recourbée en avant, et dont la queue étroite recouvre le cou et tombe sur le haut de la robe.