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À l’invar des écrivains réalistes, Ourliac réduit la description aux proportions les plus strictes & les plus naïves ; il supprime presque le portrait ou il l’enchâsse au milieu d’un incident, & ce lui est affaire d’une ligne ou deux.

Ce n’est que dans le pastiche que son style acquiert de la prestesse & de la lumière ; prenons pour modèle le début d’Aurore & Point-du-Jour, légende de corps-de-garde :

« Le régiment du roi était alors en garnison à Nancy, en Lorraine, la plus jolie ville de France, alignée comme un bataillon sous les armes, de bon séjour & d’agréable vie au soldat, sinon que le vin y est un peu cher. Et, de même que les grenadiers de ce régiment l’emportaient sur toute l’armée, le plus fier, le plus beau, le plus glorieux de ces grenadiers était Desœillets, dit l’Aurore, grand garçon du Languedoc, tenant bien du cru, hardi comme un page, brave comme un sabre, menteur comme un arracheur de dents, bel esprit, dansant bien, jouant du fifre, prévôt d’armes, tirant l’espadon, la pointe, la contre-pointe, faisant des contes à tenir un corps-de-garde éveillé toute la nuit, & en état de chanter chansons, marches, romances & complaintes d’ici à demain, sans chanter la même. »

Nous ne croyons pas qu’il soit possible de tirer un enseignement quelconque de l’existence & de l’œuvre d’Édouard Ourliac. Où le malheur passe, si précoce & si brutal, l’analyse perd la