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comme l’appelait Voltaire, ne parla tant d’elle-même que lorsqu’il n’y eut plus personne pour en parler.

On lui donna le fauteuil de Parny, — celui-là qui se roulait sur un lit de roses, & rimait chaque matin les baisers de la veille ; un poëte trop impie cependant pour être bien amoureux, & un drôle d’académicien, à vrai dire : un marquis en habit de berger, qui avait crayonné douze chants de blasphèmes en se jouant, — la Guerre des Dieux, — que vous vous rappelez peut-être pour l’avoir lue avec un souriant effroi. C’était le seul fauteuil vacant, & M. de Jouy n’eut garde de le refuser.

Je m’aperçois que je laisse de côté les dates. Pour peu que vous y teniez cependant, je vous apprendrai que M. de Jouy a vécu soixante-dix-sept ans, & qu’il est né dans la vallée de Bièvre.

Douce vallée de Bièvre ! — Il n’a jamais perdu de vue ses frais ombrages, ses gazons verts & ses troupeaux blancs. Même dans l’Inde, en France au plus fort de la Terreur, en Suisse, en Belgique, en Italie, M. de Jouy est toujours resté l’homme de la vallée de Bièvre. Le beau du Consulat & de l’Empire, l’ermite, le causeur, le franc-parleur n’a jamais pu dépouiller entièrement le villageois de Seine-et-Oise, — naïf villageois, avec du bon sens & de l’esprit