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petits mémoires littéraires

souffrirai pas… Ce serait une folie… J’aime mieux renoncer au ballet. Donnez-moi cinquante francs et je m’en vais.

Mais Lespès est déjà possesseur du coupon de la loge.

— Entrons ! dit-il.

Bilderbeck le suit en marmottant :

— Cinquante francs… rien que cinquante francs ! Puisque vous avez de l’argent !

— Ce n’est pas une raison.

…… Ils seprélassent dans la loge et se repassent une énorme lorgnette louée à l’ouvreuse.

Le ballet est commencé depuis longtemps.

— Bilderbeck, que pensez-vous de cette petite sauteuse ?

— Laquelle ?

— La seconde, de ce côté-ci… celle qui lève…

— Le bras ?

— Non, la jambe.

— Prêtez-moi la lorgnette, fait le tailleur.

— Vous plait-il qu’après le spectacle nous l’invitions à sucer quelques écrevisses et à tremper le bout de son museau rose dans une coupe de Champagne ?

— Qui ?

— Elle, parbleu ! la petite Verdurette.

— Oh ! vous croyez qu’elle accepterait… comme cela ?

— Si je le crois ? j’en suis certain… Rendez-moi la lorgnette.

— En vérité, observe le tailleur Bilderbeck, ces actrices formant une corporation bien séduisante !

— Attendez ! dit Léo Lespès ; je viens de faire un signe à Verdurette… et elle m’a compris.