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plaisir à recevoir vos lettres, mais je ne puis vous promettre d’y répondre que de loin en loin. »

On voit d’ici les appréhensions de l’épicurien, menacé dans sa retraite et dans sa paresse. Cependant il s’agit de ne pas froisser un confrère, et Van den Zande ajoute : « Bien que je ne fasse plus de contes, je prendrai mon temps pour en faire encore un que je vous dédierai, mais qui sera trop leste pour figurer dans la seconde édition des Fanfreluches de votre vieux confrère en Apollon. »

Se peut-il qu’à soixante-douze ans on songe encore à travailler dans le genre leste ? Quels tempéraments que ceux de la génération de Van den Zande !

François Grille se réjouit de la promesse de ce conte ; il se réjouit en prose, il se réjouit en vers. Pourtant il a été récemment éprouvé dans sa plus chère affection : sa femme s’est cassé le bras droit, mais la réduction a été heureusement pratiquée : « Aujourd’hui elle se porte mieux, et vous allez le voir par une fable que j’ai pu faire auprès d’elle. »

Ce trait est digne de nos meilleurs comiques.

Au bout de quelque temps, Van den Zande envoie son conte, en jurant que c’est le dernier et qu’il doit aviser à se tirer des griffes du diable. Grille ne se possède pas de plaisir ; et après l’avoir chaleureusement remercié, il le détourne de ses projets de conversion sur le ton d’enjouement propre aux indévots :

« Croyez-moi, ne luttez pas contre l’enfer, et puisque vous avez déjà une pacotille de damnées pages, continuez, trempez votre plume dans la joie franche et vive, et ne changez pas un régime qui vous a jusqu’à présent si merveilleusement réussi.

Gardez le Fayard (papier) et la laine
Qui des rhumes vous ont tiré ;