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goût, qui était en même temps un acte d’audace : il se plaça sous le souvenir de l’auteur de la Légende des siècles.

« L’œuvre d’un de vos plus illustres confrères, — dit-il, — que la politique tient malheureusement éloigné de vous, renferme une pièce de vers puissante et originale, qui se nomme le Satyre. L’auteur y raconte que le grand Hercule prit plaisir un jour à mener Pan dans l’Olympe. Cette fantaisie mythologique m’a paru avoir quelque analogie avec ma situation actuelle.

M. de Sacy, chargé de répondre au nouvel élu, accepta, sans se faire prier, cette « situation ». La force impose toujours ; mais il prit sa revanche sur la force, en se retranchant dans le bon goût. Il essaya des citations pour avoir le droit de s’arrêter sur les passages entrés trop violemment dans l’admiration publique. Il cita de très bonne grâce le passage suivant :

C’est que la Liberté n’est pas une comtesse
Du noble faubourg Saint-Germaim,
Une femme qu’un cri fait tomber en faiblesse,
Qui met du rouge et du carmin.
C’est ue forie femme aux………………………

M. de Sacy s’arrêta, oubliant que la métaphore lui permettait de recevoir M. Barbier dans le sein de l’Académie. En quoi le sein empêchait-il les fortes mamelles du récipiendaire ?

L’un et l’autre orateur enterrèrent d’ailleurs avec mille égards M. Empis, qui dort pour l’éternité dans un trou honorable, où personne ne s’avisera d’aller réveiller sa cendre littéraire.

Un antique usage oblige les nouveaux académiciens à aller présenter leur discours au chef de l’État. Le chef de l’État actuel, qui était Napoléon III, se souve-