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petits mémoires littéraires

Ce croquis, daté de 1862, et qui n’avait jamais été destiné à l’impression, renferme quelques menues erreurs que je veux détruire en commençant. Auguste Barbier n’était pas gros. Il était myope, quoique sans excès, mais il était poli ; — et dans l’intimité, il a toujours protesté, en souriant, contre cette assertion de l’auteur trop susceptible des Lettres à la Princesse, qui le représentait comme un homme capable de ne pas rendre les saints qu’on lui adresse.

Les autres erreurs se dissiperont d’elles-mêmes au fur et à mesure que j’avancerai dans ce chapitre.

Il semble tout naturel qu’Auguste Barbier soit né à Paris. Il a vu le jour le 28 avril 1805, quai Malaquais, dans une maison qui portait alors et qui porte encore le numéro 19. Son père était avoué, et non notaire. Après de bonnes études, le jeune Barbier fit son droit ; mais déjà le démon littéraire le guettait et rôdait autour de l’école. Parmi les jeunes gens avec lesquels il se lia à cette époque, deux d’entre eux influèrent sur sa vocation : Alphonse Rover et Brizeux. Il écrivit avec le premier un roman historique intitulé : les Mauvais Garçons, paru en 1828. Le second le poussait plus particulièrement vers la poésie ; ce fut le second qu’il écouta.

On retrouverait quelques-uns des vers d’Auguste Barbier dans les recueils de ce temps-là ; cela répondrait aux gens qui prétendent qu’il n’avait absolument rien fait imprimer avant les Iambes. Il est vrai que ce sont, pour la plupart, des élégies ou des idylles, où rien n’annonçait un tempérament spécial. Il s’ignorait encore. La révolution de Juillet devait le révéler à lui-même. La tête exaltée par les combats auxquels il venait d’assister, il ramassa l’iambe qu’André Chénier avait laissé échapper au pied de l’échafaud, et il