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petits mémoires littéraires

pour qui Alfred de Musset a rimé de si adorables conseils :

Oui, si j’étais femme, aimable et jolie,
Je voudrais, Julie,
Faire comme vous ;
Sans peur ni pitié, sans choix ni mystère,
À toute la terre
Faire les yeux doux.

La Julie de M. Octave Feuillet avait-elle l’ambition de s’ajouter à ces deux Julie et à toutes les autres ? Cette fois encore, il a mis résolument les pieds dans le drame ; même les éléments comiques qu’il y avait dans Montjoye ont été sévèrement exclus de Julie. Il est évident que M. Feuillet a été très préoccupé par le Supplice d’une femme, cette œuvre d’une facture télégrammique. Il a fait, à son tour, une pièce brutale, hachée, avec la mort pour dénouement et pour moralité. Vieille histoire d’ailleurs : toujours la femme, le mari et l’amant ; puis, comme personnages accessoires, la petite fille et l’éternelle caillette, l’évaporée, la toquée de toutes les pièces modernes. Les trois actes de Julie, comme les trois actes du Supplice d’une femme, se passent dans le même décor. Au premier acte, Julie médite de tromper son mari ; — au deuxième, elle l’a trompé ; — au troisième, le mari, en qui s’éveille tardivement le soupçon, la presse tellement qu’elle avoue sa faute. Mais la secousse a été trop forte, elle meurt de son aveu. L’amant et le mari restent seuls en présence de ce cadavre, qui les accuse tous les deux, car l’auteur a su répartir un bon nombre de torts sur la tête du mari.

Julie, sans être une œuvre supérieure, sans même valoir Montjoye, renferme d’excellentes scènes. Le