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à cette étude trop sèche d’une des variétés de l’ingratitude humaine.

Retour au Gymnase. La veine change. Le Gendre de M. Poirier (1854) marque un progrès dans la manière de M. Augier. Succès complet. Jules Sandeau est de la fête : c’est encore un de ses romans qui a fourni le sujet. — Le Gendre de M. Poirier est une des pièces modernes qui ont le plus approché de la grande comédie, et autour de laquelle se sont ralliées toutes les critiques.

Je passe sur Ceinture dorée (en collaboration avec M. Édouard Foussier) pour arriver plus rapidement au Mariage d’Olympe, qui achève complètement la rupture de M. Augier avec le passé. Le Mariage d’Olympe fut représenté au Vaudeville en 1855. Le coup de pistolet qui le termine souleva des protestations, mais on fut d’accord pour reconnaître que l’auteur n’avait jamais prouvé autant de crânerie et de vigueur réelle.

Trois ans après, M. Émile Augier était admis à l’Académie française.

Il vint, le 28 janvier 1858, prendre la place de M. Salvandy. Je ne relève rien de bien remarquable dans son discours, si ce n’est un éloge fermement accusé de Voltaire. C’était à un instant où l’on croisait beaucoup contre le patriarche de Ferney. « Nous sommes tous ses héritiers, ingrats ou non, s’écria M. Augier ; de quelque façon qu’on juge son œuvre. Voltaire est aujourd’hui un fait accompli sur lequel on chercherait en vain à revenir. » En ce moment, l’Académie française dut trembler que le nom de Pigault-Lebrun ne se trouvât amené par la force des choses…

Huit jours après cette solennité, l’Odéon représentait une nouvelle comédie du jeune académicien : la Jeunesse, une comédie en cinq actes et en vers,