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petits mémoires littéraires

» Trois heures et demie. — Je viens de fixer la cordelière.

» J’ai essayé les quatre petits morceaux de bois attachés ensemble ; mais je ne pouvais pas les faire manœuvrer.

» J’ai pris un petit morceau de bois.

» À quatre heures ou quatre heures un quart j’exécuterai, pourvu que tout marche à mon gré.

» Je ne crains pas la mort, puisque je la cherche, puisque je la veux ; mais la souffrance prolongée m’effraie.

» Je me promène ; les idées s’évanouissent.

» Je n’ai que la conscience de mes enfants.

» Le feu noircit.

» Quel silence m’environne !

» Quatre heures. — Quatre heures sonnent. Voilà bientôt le moment du sacrifice.

» Je mets ma tabatière dans le tiroir de mon petit bureau.

» Adieu, mes filles chéries.

» Dieu pardonnera à mes douleurs.

» Je mets mes lunettes dans mon tiroir.

» Adieu… encore une fois, adieu, mes enfants bien-aimées ! vous avez ma dernière pensée. À vous les derniers battements de mon cœur ! »

Eh bien !

Qu’en dites-vous ?

Je défie qui que ce soit de lire sans effroi ce sombre mémorial.

Toutes les inventions du naturalisme pâlissent devant ce récit à la fois touchant et terrible. Je n’ai voulu le couper par aucune réflexion ; quelles réflexions