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OUBLIÉS ET DÉDAIGNÉS.

Le lendemain, il était incarcéré, et Suzanne était conduite aux Anglaises.

Son écrou portait que l’on avait saisi chez elle une liste de conspirateurs de tous les ordres. Méprise singulière ! cette liste n’était autre que celle de tous ses amants ; un simple badinage allait coûter la vie de l’être qu’elle aimait le mieux au monde. En effet, quelques jours après sa détention, mettant le visage à une petite lucarne qui donnait sur la rue, elle entendit le crieur du journal du soir annoncer la mort de Fabre d’Églantine, de d’Espagnac et d’Hérault de Séchelles. Suzanne était seule et montée sur une mauvaise table ; elle tomba à la renverse et se fracassa la tête. Trois mois s’écoulèrent avant qu’elle pût recouvrer la raison…

Que vous raconterai-je encore de cette existence ? Délivrée de ses fers et ne sachant où aller, elle alla à l’hôpital et y demeura un an. J’ai oublié de dire qu’elle avait divorcé : du côté de son mari, elle n’avait donc aucun espoir de refuge ; d’un autre côté, Quinette était prisonnier en Autriche ; et puis, c’est triste à avouer, les souffrances et la maladie avaient altéré les traits de Suzanne ; il ne lui restait plus qu’un parti à prendre, détestable et désespéré, c’était de se jeter… dans la littérature. Le genre facile des romans d’alors la séduisit : avec ses souvenirs, elle composa plusieurs ouvrage d’une physionomie baroque, écrits dans un style sans nom, pétulant, obscur, sentimental, effronté. Celui qui fit le plus de bruit, c’est-à-dire de scandale, est intitulé : Illyrine ou l’Écueil de l’inexpérience ; elle y a rassemblé les principaux événements de sa vie, et s’y est peinte elle-