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DORVIGNY.

prendras sera pour toi. — Oh ben ! laisse faire, va, je ne serai pas le plus mal partagé, s’écrie Dodinet. — Oui-dà, mais à condition que, quand tu m’auras ruiné, tu me prendras pour intendant à ton tour… »

Comme on le voit, ces plaisanteries sont devenues classiques, et la plupart même ont passé dans le langage usuel.

Ce n’est pas tout : la province ne se contenta pas des Janots que Paris lui envoyait, elle se mit à en composer, elle aussi. J’ai sous les yeux la Nuit de Janot ou le Triomphe de mon frère, comédie-parade représentée pour la première et dernière fois à Chartres en Beauce, le dimanche 4 mars 1780. Ainsi que le titre l’indique, il s’agit de l’apothéose de Janot, que tout le monde s’attache à combler de bienfaits, à qui le savetier Simon donne sa fille en mariage, à qui M. Ragot fait présent de son fonds de boutique, à qui le commissaire fait restituer sa garde-robe et son écu de six livres. La pièce n’eut pas de bonheur, malgré ce point de vue nouveau, et quoique l’auteur eût présenté son personnage comme un symbole, presque comme une figure révolutionnaire. « En effet, dit-il dans une post-face, sans avoir consulté le créateur de Janot, je suis certain que son but principal, en formant son héros, a été de placer sous les yeux du public les scènes et les injustices journalières qu’on exerce envers ce que nous appelons le vulgaire et que M. Dorvigny a désigné sous le nom de Janot. » Diable ! voilà un auteur qui voit loin !

Christophe Lerond fut le deuxième succès de Dorvigny.

Quand on imprima la pièce, il la lit précéder de