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OUBLIÉS ET DÉDAIGNÉS.

pas m’assurer du jour. — Ni de l’heure, ni du mois sans doute ? répondis-je ; allons, fouette, cocher ! Et je partis, en me promettant bien de ne jamais réclamer ni l’appui ni les conseils de ceux qui ont oublié les adversités. »

Sa rancune contre Beaumarchais s’effaçait cependant devant son admiration pour ses ouvrages ; elle en fournit la preuve en composant peu de temps après le Mariage inattendu de Chérubin, qui fut présenté à la Comédie italienne avec aussi peu de bonheur que ses autres pièces. Cette production, née en vingt-quatre heures, est d’un coloris pâle, et le dialogue n’offre aucune de ces paillettes qui éblouissent dans la Folle journée. Voici en quelle prose rimée elle se plaint dans le vaudeville final :

Souvent des auteurs femelles
Le public est satisfait ;
Mais les pédants sans cervelles
Ne trouvent rien de parfait ;
Dans leurs censures cruelles
Ils maltraitent tous les jours
Les Grâces et les Amours.

Les Grâces et les Amours, c’est elle, c’est Olympe, elle le croit de bonne foi ; elle ne s’aperçoit pas que son miroir tourne à l’épigramme, que les roses expirent sur ses joues et que la solitude se fait autour d’elle. Déjà, chose inévitable, la littérature a exclu la coquetterie ; son œil devient hagard, sa chevelure est dépeignée comme une métaphore de mauvais goût. Triste destinée des auteurs femelles, comme elle dit ; inconcevable fatalité qui fait les lauriers incompatibles avec les myrtes !