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Je suivais avec un plaisir malin les progrès de la contagion, dont j’étais le foyer. Vainement les comédiens redoublaient d’efforts pour secouer cet ennui, dont la manifestation leur arrivait par une multitude de mâchoires ouvertes ; il y eut un moment où l’épidémie, franchissant la rampe, vint leur contracter la gorge et resserrer au passage les hémistiches de l’infortuné Saurin. Dès lors, la chute de la pièce fut décidée ; je me hâtai d’y porter les derniers coups en bâillant plus démesurément que jamais. Cette fois, mon intention n’échappa pas aux deux exempts.

Celui de droite me dit :

— Monsieur le chevalier, nous sommes désolés d’avoir à vous rappeler à la prudence.

— Pourquoi cela ? demandai-je.

— Parce que vous bâillez avec une affectation visible.

— Eh bien, si je m’ennuie ?…

Les deux exempts se consultèrent du regard ; ma réponse les avait embarrassés.

— Au fait… murmura celui de gauche.

Mais l’exempt de droite, qui était le plus féroce, crut trancher la question par ces mots :