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CURIOSITÉS LITTÉRAIRES

Par-ci, par-là ressemble à tous les premiers volumes de vers connus ; c’est un hymne à la nature, un éveil de sensations : Par-ci, c’est-à-dire par les sentiers embaumés d’aubépines, par les prairies émaillées de boutons d’or, par les ruisseaux roulant sur des cailloux roses et blancs, par les bois profonds ; — Par-là, c’est-à-dire par les réminiscences classiques et par les aspirations romantiques, par Victor Hugo, par Alfred de Musset, par tous les dieux de la jeunesse et de l’amour !

Que n’en est-il resté toujours à Par-ci, par-là, cet Alfred Touroude, qui promettait un poète et qui a donné un dramaturge !

Hélas ! le théâtre l’avait fasciné dès le premier jour ; le théâtre le réclama tout entier. Et quel théâtre, miséricorde ! Non pas le babil galant de Marivaux, non pas l’éclat de rire sonore de Dancourt, ni même la fantaisie un peu laborieuse de Victorien Sardou ! Alfred Touroude, l’un des trois jeunes gens du Havre, alla tout de suite au drame, — au drame fauve, rugissant, ensanglanté ; — au drame à coups de couteau, à coups de serpe, à coups de hachette ; — au drame naïf et monstrueux qui s’appelle le Bâtard et le Lâche.