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CURIOSITÉS LITTÉRAIRES

L’éloge du maquillage amène, sous la plume de Baudelaire, l’éloge de la mode. Toutes les modes sont charmantes selon lui, ou ont été charmantes.

La poudre de riz lui plaît infiniment ; son usage a pour but et pour résultat de « créer une unité abstraite dans le grain et la couleur de la peau, laquelle unité, comme celle produite par le maillot, rapproche immédiatement l’être humain de la statue, c’est-à-dire d’un être divin supérieur ».

Voici maintenant pour le fard, et pour les paupières noircies et allongées :

Quant au noir artificiel qui cerne l’œil, et au rouge qui marque la partie supérieure de la joue, bien que l’usage en soit tiré du même principe, du besoin de surpasser la nature, le résultat est fait pour satisfaire à un besoin tout opposé. Le rouge et le noir représentent la vie, une vie surnaturelle et excessive ; ce cadre noir rend le regard plus profond et plus singulier, donne à l’œil une apparence plus décidée de fenêtre ouverte sur l’infini ; le rouge qui enflamme la pommette augmente encore la clarté de la prunelle, et ajoute à un beau visage féminin la passion mystérieuse de la prêtresse.

On ne discuterait pas avec plus de solennité les plus hautes questions sociales.