Le dernier exemplaire du Diable Boiteux ! Tout Monselet est dans ce simple trait.
Le biographe de Rétif de La Bretonne était, du reste, on l’a dit Lien souvent, en toute sa personne, en tout son talent, un homme du xviiie siècle. Il en avait le tour d’esprit, l’élégance, l’impertinence aimable, et on lui eût cherché volontiers des talons rouges. Y abbé galant, un causeur de ruelles ou encore un familier des réunions choisies où se groupaient jadis les beaux esprits et les fins diseurs mêlés à des auteurs aux gages des libraires. Il semblait un échappé du café Procope, un railleur qui eût écrit de petites notules très narquoises en marge des grandes feuilles de l’Encyclopédie. Avec cela, bien moderne de ton, tout à fait de son temps, adorant Paris, mais trouvant pourtant que ses ruisseaux littéraires sentent mauvais, s’amusant parfois aux drôleries de l’argot, mais comme un hotaniste cueillerait des fleurs qui entêtent ou qui distillent un poison ; — par curiosité.
— Quand je vous envoie un mot, à votre adresse du quai Voltaire, mon cher ami, lui disait devant nous Victor Hugo, j’ai toujours envie d’écrire : « ’ Monsieur Charles de Voltaire, quai Monselet. »
Et tout un jugement littéraire, très subtil et très juste, tenait dans cette boutade délicate du grand poète.
Mais ce Monselet du xvui siècle était — j’insiste sur le dualisme de ce rare talent — un balzacien du xixe siècle. Il adorait le lyrisme de Hugo, le pittoresque de Gautier, le génie de Balzac, la fantaisie de Banville. Il comprenait tout, bien qu’en jugeant tout. Il adorait les petites phrases qui en disent plus long que les grandes, et d’un trait il peignait un homme. Sa Lorgnette littéraire vaut mieux que les « instantanés » de Rivarol, comme on dirait aujourd’hui. L’es-