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antisocial et antinaturel », où le collégien, privé de toute initiative, « vit comme un cheval attelé entre les deux brancards de sa charrette ». Madame Taine se décida aussitôt à venir vivre à Paris avec ses filles et à prendre son fils chez elle. Alors commença, pour ne plus cesser jusqu’au mariage de Taine, sauf pendant ses trois années d’École normale et les deux qui suivirent, cette vie commune où le plus tendre et le plus attentif des fils trouvait dans sa mère, comme il l’a dit lui-même, « l’unique amie qui occupait la première place dans son cœur ». « La vie de ma mère, écrivait-il en 1879, n’était que dévouement et tendresse… aucune femme n’a été mère si profondément et si parfaitement. » Ceux qui savent combien Taine avait besoin de ménagements et de soins pour que sa nature nerveuse trop sensible pût résister et à l’excès de l’activité cérébrale et aux froissement de la vie, songent avec reconnaissance aux bienfaisantes influences féminines qui, d’abord au foyer maternel, puis au foyer conjugal, ont assuré le libre développement de son génie, l’ont protégé contre les atteintes trop rudes de la réalité, ont entouré son travail de paix et de sécurité, ont allégé les heures, pénibles entre