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d’existence et de labeur, et Henriette, qui pensait que son frère, en quittant l’Église pour la science, n’avait fait que changer de prêtrise, ne supposait pas que cette union pût jamais être dissoute. Quand son frère lui parla de ses intentions de mariage, elle laissa voir un si cruel trouble intérieur que celui-ci résolut de renoncer à un projet qui paraissait menacer le bonheur d’un être si dévoué et si cher. Mais alors ce fut mademoiselle Renan elle-même qui courut chez mademoiselle Scheffer la supplier de ne pas renoncer à son frère et qui hâta la conclusion d’une union dont l’idée seule l’avait bouleversée. Sa vie, du reste, ne fut pas séparée de celle de son frère. Elle s’attacha passionnément à ses enfants. Quand Ernest Renan partit en 1860 pour la Phénicie, chargé d’une mission archéologique, elle l’accompagna et y resta avec lui quand madame Renan dut rentrer en France. Ces quelques mois de vie à deux furent sa dernière joie. La fièvre les saisit l’un et l’autre à Beyrouth. Elle mourut, tandis que lui, terrassé par le mal, avait à peine conscience du malheur qui le frappait. Dans le petit opuscule biographique consacré à sa sœur Henriette, la plus belle de ses œuvres, et un des plus purs chefs-d’œuvre