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dans les bibliothèques d’Italie[1] et en rapportait sa thèse de doctorat soutenue en 1852, un livre sur Averroès et l’Averroïsme, capital pour l’histoire de l’introduction de la philosophie grecque en Occident par les Arabes. En même temps, il publiait dans des recueils périodiques plusieurs essais, entre autres celui qui, remanié, est devenu son livre sur l’Origine du langage, et il écrivait un ouvrage considérable sur l’Avenir de la science, qu’il n’a imprimé qu’en 1890.

Ce livre, composé en quelques mois par un jeune homme de vingt-cinq ans, contient déjà

  1. Ce voyage d’Italie fut un enchantement et lui laissa de durables impressions. Voici ce qu’il disait de Rome dans une lettre du 25 mars 1850 : « Je suis de retour à Rome pour la deuxième fois. Vous voyez que cette ville exerce sur moi une attraction toute particulière ; j’y aurai passé près de cinq mois, et tous les jours je l’envisage par des faces nouvelles et je lui trouve de nouveaux charmes. Rome est la ville du monde où l’on est le plus à l’aise pour philosopher. Nulle part la pensée n’est plus libre, la vue plus limpide. Rome est comme les grandes œuvres de l’esprit humain ; l’impression qu’elle produit est très complexe. Il y a place pour l’admiration, pour le mépris, pour le rire, pour les pleurs. C’est le tableau le plus parfait de la vie humaine, ou plutôt c’est le résumé de la vie de l’humanité, concentré en un point. Si vous visitez jamais ce pays, vous partagerez, j’en suis sûr, mes sympathies, et vous préférerez cette grande ruine à cette Naples trop vantée, qui n’a pour elle que son admirable nature. Naples ne m’a laissé que de pénibles souvenirs. Il est impossible, en face d’une telle dégradation de la nature humaine, de s’ouvrir de gaîté de cœur au charme des beaux lieux, lors même que ces lieux s’appellent Sorrente et Portici, Misène et Baïa. »