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déjà vraie du style du journal. Madame Michelet se trompe quand elle dit que les pensées et le style du Journal datent de 1820. Les pensées sont celles dont l’œuvre entière de Michelet est inspirée ; le style ne date pas. Le Journal compte parmi ses œuvres les plus exquises par la forme comme par les sentiments ; moins pittoresque, moins coloré qu’il ne le deviendra plus tard, son style y a déjà la chaleur, la souplesse, l’harmonie musicale ; il est déjà rythmé aux battements de son cœur.

La croirait-on écrite en 1821, cette phrase haletante d’émotion, écrite après une rencontre avec Thérèse : « Il me semble que mon âme et mon corps, depuis ce moment, n’aillent plus ensemble. Lui est, ici, misérable ; elle, mon âme, je ne sais où, en fuite de moi, me laissant là, gisant, demi-mort. Eh ! que ne suis-je donc mort tout à fait ! » Ne nous étonnons pas trop, mais félicitons-nous au contraire, que le français de Michelet ait « soulevé l’indignation » des juges de l’agrégation de 1821. C’est sans doute ce qui fait qu’il nous ravit aujourd’hui, qu’il n’a pas vieilli d’un jour.

Jusque dans le détail on retrouve dans son Journal des pensées qui seront développées plus tard, des esquisses qui deviendront des