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l’Évangile qu’il a devant les yeux, mais je ne sais quel Christ monastique, entrevu dans une miniature de missel ou sur un vitrail d’église. Quand il commença son Histoire de France, les tendances cléricales de la Restauration semblaient à jamais vaincues et inoffensives ; on ne pensait pas que l’admiration pour le moyen âge pût servir de prétexte à un retour vers les institutions ou les idées du passé. Michelet, sans partager les croyances catholiques[1], admira le rôle bienfaisant de l’Église, la grandeur de son développement historique pendant les premiers siècles du moyen âge, et se laissa aller sans arrière-pensée à la juste sympathie que lui inspirait « cette mère du monde moderne ». La vie de l’Église se confondait pour lui avec la vie même de la patrie, et la renier c’eût été en quelque sorte renier la France. Non seulement il écrivait sur l’architecture gothique, sur la sainteté du célibat ecclésiastique, sur la piété

  1. Il eut pourtant vers dix-huit ans une période de mysticisme et de foi ; n’ayant pas reçu le baptême dans son enfance, il se fit volontairement baptiser en 1816. Mais, dans ses premiers écrits, on voit que, s’il conserve du respect pour l’Église, il n’a plus la foi. Sa foi même n’a jamais été précise. Elle était plus mystique et sentimentale que dogmatique. Les dogmes n’ont jamais été pour lui que des symboles. (Voyez l’appendice).