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mes énergiques, enthousiastes, éloquents, spirituels, de Pierre l’Hermite, de Calvin, de Camille Desmoulins. Sa famille vint à Paris après la Terreur, pour fonder une imprimerie. Le 21 août 1798 naquit Jules Michelet, dans le chœur d’une ancienne église, occupée par l’atelier paternel, « occupée, nous dit-il, et non profanée ; qu’est-ce que la presse au temps moderne, sinon l’arche sainte[1] ? » Il y avait là un présage d’avenir.

Les premières années de sa vie furent tristes et pénibles. Il grandit « comme une herbe sans soleil, entre deux pavés de Paris ». Dès 1800, Napoléon supprima les journaux, restreignit par tous les moyens le commerce de la librairie. La pauvreté vint. Il fallut renvoyer les ouvriers ; le grand-père, le père, la mère de Michelet, lui-même âgé de douze ans, firent tout le travail de l’imprimerie. Ce labeur précoce aurait pu, semble-t-il, étouffer dans leur fleur les facultés de l’enfant. Au contraire, pendant que ses mains assemblaient machinalement les lettres qui servaient à la composition de livres niais et insipides, son imagination prenait des ailes. Ce don merveilleux, qui

  1. Le Peuple, page 22.