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les conservateurs, à je ne sais quelle terreur des périls et des responsabilités du régime démocratique. Nous avons cherché à expliquer, en racontant sa vie, comment et pourquoi dans son dernier ouvrage, il a changé de ton et dans une certaine mesure de point de vue. Que les émotions de la guerre et de la Commune aient agi sur l’esprit de Taine, il n’est pas possible de le nier ; mais elles n’ont pas agi de la manière mesquine et puérile qu’on imagine. Il a cru y voir le signe de la décadence de la France, l’explication et la conséquence des bouleversements politiques survenus il y a un siècle. Bien loin de lui reprocher l’émotion qu’il en a ressentie, je suis tenté de lui savoir gré de s’être aussi vivement ému et, voyant la France sur la pente d’un abîme, d’avoir cru qu’il pouvait l’arrêter par le tableau tragique des maux dont elle souffre.

Il n’a point, d’ailleurs, renié sa méthode ni sa doctrine ; il les a plutôt accentuées. Nulle part il n’a employé d’une manière plus constante le procédé d’accumulation des petits faits pour établir une idée générale ; nulle part il n’a exposé la série des événements de l’histoire comme plus strictement déterminée par l’action de deux ou trois causes très simples agissant