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CONTES POPULAIRES EN ITALIE
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Mais c’était surtout sa femme qu’il tourmentait ; elle l’avait mis d’abord au désespoir et presque hors de sens ; c’était lui maintenant qui la faisait tourner comme un cheval de manège. Il lui donnait pour mari tantôt Farfadet qui l’égratignait et crachait sur elle des jets de soufre et de feu, tantôt Lucifer qui la criblait de coups de cornes, tantôt Carnazza, qui, en soufflant, la gonflait comme une outre, et vlin, vlan, la rouait de coups (tiritimpiti, tiritampité). Les démons étaient sur les dents, et eux-mêmes avaient pitié de la pauvre femme.

Vint enfin la Mort chercher le magicien Virgile : ah ! seigneur, soyez béni. Les diables firent alors un complot dans l’enfer :

— Il ne faut pas que ce mauvais gueux entre chez nous, il nous ferait travailler comme des nègres.

Et avec des barres et des chaînes ils fermèrent les portes de la maison. Arrive le mort, qui chante :

— Top, top !

— Oui est là ?

— Le magicien Virgile.

— Passe ton chemin ; il n’y a pas de place ici pour toi.

— Mais où faut-il que j’aille ? je suis damné.

— Arrière ! arrière !

Et Virgile resta dehors, pleurant et se mordant les doigts, « parce que la Mort lui avait ôté la verge de l’art du commandement. »

Mais laissons les diables et prenons Maugis. L’affaire lui déplut ; que faire ? Il recueille l’âme et les os de Virgile, et les porte dans une île bien loin, bien loin, là où la mer est la plus haute et profonde. Il construit une belle sépulture de pierre, comme une caisse sans couvercle, y jette l’âme et les os, dit