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CONTES POPULAIRES EN ITALIE

cie, science où il était de première force ; il la tenait d’un démon qu’il avait tiré de la fente d’un rocher. Quand il eut appris de ce démon tout ce qu’il voulait savoir, il le remit dans la roche. Virgile creusa de plus des égouts, construisit les aqueducs de Naples, fit jaillir l’eau soufrée de Santa-Lucia, qui était d’abord de l’huile, aussi l’église défendait-elle d’en boire le vendredi et le samedi. On lui doit enfin les bains de Pouzzoles qui guérissaient de tout, comme l’attestaient des inscriptions, des peintures et des sculptures dont on voit encore des traces. C’est pourquoi les médecins de Salerne, ruinés parla concurrence, partirent une belle nuit sur une barque et allèrent détruire les thermes de Virgile et le temple de Sérapis, où cette hydrothérapie était une sorte de religion ; on voit encore les ruines des bains et du temple. Les allopathes de Salerne, après ce bel ouvrage, remontèrent sur leur barque pour s’en retourner chez eux, mais ils furent assaillis par une tempête et périrent tous.

On n’en finirait pas, si l’on voulait dire tout ce que Virgile fit à Naples : un étal de boucherie où la viande ne se corrompait jamais, un jardin à Pausilippe entouré de murs invisibles et infranchissables : les fruits et les fleurs y pullulaient en toute saison au milieu de plantes merveilleuses, d’herbes salutaires dont la plus rare, celle de Lucius, rendait la vue aux aveugles ; une trompette qui sonnait d’elle-même les jours de sirocco et qu’on entendait au loin sur la mer, enfin quantité de travaux en bronze, car Virgile était artiste et savait fondre les métaux ; un cheval colossal, un cavalier, un archer, une sangsue, une grosse mouche et une porte en fer. La tête du cheval existe encore, on peut la voir au musée de Naples ; le cavalier parcourait la nuit les rues de la