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CONTES POPULAIRES EN ITALIE

étouffée dans son germe par les cavaliers de l’empereur. Un jour, trois rois voulurent s’affranchir, et à cet effet envoyèrent à Rome quatre compères chargés d’enfouir de l’or en différents endroits ; ces compères se donnèrent pour des chercheurs de trésors et délivrèrent aisément ce qu’ils avaient enterré eux-mêmes ; ils dirent alors à l’empereur qu’en fouillant sous la tour de Virgile ils trouveraient une montagne d’or. L’empereur hésita longtemps à les laisser faire ; enfin sa cupidité fut la plus forte ; il donna son anneau aux compères afin qu’ils ne fussent pas gênés dans leur travail. La tour de Virgile croula, Rome avec elle. Vinrent les trois rois rebelles et l’empire fut détruit.

Un jour Virgile fut mis en prison, bien qu’il vécût en bons termes avec Auguste. Il dessina un vaisseau sur la muraille de son cachot et invita les autres prisonniers à remuer régulièrement des bâtons qui se changèrent en rames ; le vaisseau dessiné sur le mur devint un navire véritable et, soulevant dans les airs l’enchanteur et ses compagnons de captivité, alla les déposer en Apulie. Là, le vaisseau disparut sous le sable du rivage et les rames reprirent leur état de simples bâtons. Virgile s’en vint seul et s’arrêta près de Naples, dans une maison de pauvres gens qui n’avaient rien à manger ; il envoya ses esprits à la ville, et les esprits rapportèrent aussitôt des macaroni dans des plats fumant encore, qu’ils étaient allés prendre sur la table de l’empereur. L’empereur s’écria :

— Un seul homme a pu faire cela, c’est Virgile.

Le lendemain, en quittant son hôte, le poète magicien lui laissa une coupe d’excellent vin qui resterait toujours pleine, à condition qu’on ne regardât jamais dedans. Puis le bon sorcier revint à Rome,