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CONTES POPULAIRES EN ITALIE
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fait historique qui s’est passé, dit-on, le 4 décembre 1563 : en cette année-là, le peuple connaissait déjà l’Arioste. M. Imbriani pense, il est vrai, que le poème doit ótre inspiré par un événement beaucoup plus ancien et qui peut remonter au xiiie siècle : cette conjecture a été repoussée dans une discussion où nous ne voulons pas entrer. À notre humble avis, la grande épopée commune est encore à trouver, et il ne suffit pas, pour qu’elle existe, du plaisir qu’elle ferait à certains théoriciens. Les poètes viennent quand ils veulent ou quand ils peuvent, non quand les critiques ont besoin d’eux.

D’ailleurs on peut se passer d’une source commune pour expliquer les ressemblances entre les contes ou les chansons de tous les pays. M. de Puymaigre, qui a recueilli tant de chants populaires dans le pays messin, a déjà remarqué la facilité de locomotion qui caractérise la poésie campagnarde et plébéienne. « Alerte et court vêtue, comme Perrette, elle fait un chemin énorme malgré tous les obstacles ; montagnes, fleuves, rivières, et, chose incroyable, changements de langue, rien ne l’arrête. Elle passe les Alpes aussi facilement que les Pyrénées ; elle va du Piémont à la Normandie, de la Bretagne à Venise, de la Picardie à la Provence. » Et ces noms de pays ne sont pas pris au hasard ; les gondoliers chantent bien réellement dans leur dialecte futé des chants bretons.

Il est certain toutefois que bien des contes siciliens sont de très-vieux souvenirs qui n’ont jamais quitté le pays : n’oublions pas que l’île, autrefois grecque, a beaucoup gardé de la jeunesse héroïque où elle fut chantée par Homère.

Un jour, au mont Eryx, on conduisit auprès de M. Pitrè une petite fille de huit ans, appelée