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CONTES POPULAIRES EN ITALIE
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les disputes, l’âne qui brait, le chat qui miaule ; ce dernier est surtout fatal quand on a des parents en voyage. Le pire des augures est le bruit de Ttau qu’on répand sur le chemin, ou qui s’égoutte cornino des larmes. Les dévotes écoutent encore de leurs fenêtres les conversations des gens qui passent : si ce qu’ils disent est affirmatif et bienveillant, comme : « cela est vrai, tu dis bien, tu me plais, etc » elles ne doutent pas que les âmes des décollés ne leur soient favorables. En revanche, des négations, des objections, des gros mots échangés par les passants plongent les pauvres femmes dans de longues tristesses.

Mais nous n’avons pas encore tout dit sur saint Pierre. Dans les contes siciliens, cet apôtre est chargé d’un rôle comique et presque bouffon que ne lui attribuerait certes pas la dévotion plus austère du nord ;… il joue des tours aux autres, et on lui en joue souvent ; sa figure manque de gravité : c’est le gracioso de la tragédie évangélique. Il se laisse tromper par les cantiniers qui lui versent de mauvais vin en lui faisant d’abord manger du fenouil, et il est raillé même par Jésus qui l’aime pourtant, le sachant dévoué et bon homme.

Un jour le Seigneur, cheminant avec ses apôtres, leur avait dit :

— Que chacun de vous se charge d’une pierre…

Ainsi fut fait, mais saint Pierre ne prit qu’un petit caillou et s’en allait légèrement, tandis que les autres pliaient sous la charge. Ils entrèrent dans un village où il n’y avait plus de pain à vendre ; ils durent aller plus loin et s’assirent pour se reposer ; le Maître alors leur donna la bénédiction et changea en pain les pierres qu’ils avaient portées. Saint Pierre