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CONTES POPULAIRES EN ITALIE
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ditions de l’extrême Orient ; puis, au milieu de tout cela, quantité de légendes chrétiennes. Le Juif-Errant par exemple apparaît sous le nom de Buttadeo (rejette-Dieu) non-seulement dans les anciens contes, mais encore dans les récits tout frais que se font entre eux les Siciliens.

C’était en hiver, disait récemment une fille de Salsaferuta ; mon père était dans une boutique en train de se chauffer ; entre un homme qui n’était pas habillé comme les gens du pays : son bonnet et ses chausses étaient rayés de bandes jaunes, rouges et noires. Mon père en eut peur : qu’est-ce donc que cet homme ?

— Ne crains rien, répondit l’étranger ; je me nomme Buttadeo.

Le bonhomme, se souvenant de ce nom, invita e nouveau venu à s’asseoir et lui demanda le récit de ses aventures ; mais Buttadeo ne put prendre place au foyer parce qu’il était condamné par Dieu à marcher toujours, et tout en parlant il parcourait la chambre dans tous les sens, avançant et reculant avec une agitation incessante. En partant, Ivoulut laisser à l’homme un souvenir et lui indiqua « une dévotion : » la formule de « cinq credo à la main céleste et d’un sixième à la main gauche de Jésus. »

Il existe dans les contes siciliens un autre Juif également condamné à marcher toujours, mais dam un souterrain, c’est Malchus qui donna un soufflet à Notre-Seigneur avec une main gantée de fer. Jésus n’en fut point offensé et ne poussa aucune plainte, mais depuis lors le sacrilège tourne continuellement autour d’une colonne qui s’élève au milieu d’une chambre ronde : il ne mange ni ne dort, ne connaît aucun des besoins de la vie, et tourne, tourne, se mordant les doigts, frappant la colonne