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CONTES POPULAIRES EN ITALIE
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tudes et la langue toscane se permet de fortes incorrections que M. Imbriani se plait à relever. L’une des plus coupables selon nous est le déplacement de l’accent : l’accent est l’âme de la langue. Les Florentins disent Trìnita au lieu de Trinità ; nous avons entendu des savants justifier cette faute par de doctes considérations sur l’accent et la quantité, mais de quel droit les Toscans disent-ils sèdere au lieu de sedère ?

Un improvisateur qui s’était fait prier une heure pour montrer son petit talent finit par se lever et par dire en estropiant le verbe vedère :

Oh ! che bel vèdere
Se spunta il dì…

Un assistant l’interrompit aussitôt par une rime qui reproduisait la même dislocation d’accent :

Si ponga a sèdere
Basla così.[1]

Malgré ces réserves, nous reconnaissons que le Toscan est le dialecte le plus pur de l’Italie : plein de grâce, de finesse, de câlinerie, d’agacerie piquante, riche en diminutifs caressants qui se multiplient pour flatter l’oreille et cajoler l’attention. Les bonnes femmes de Florence et de Pistole racontent vive- . ment et avec entrain, ne craignent pas le détail, s’entendent à la mise en scène et, si elles n’ont pas cette fougue d’imagination, cette mobilile depensée qui nous frappe chez les Siciliennes, elles ont en revanche une aisance de mouvement, une vivacité d’allure, une pétulance et une volubilité qui don-

  1. Oh ! qu’il fait beau voir poindre le jour. — Vous pouvez vous asseoir, cela suffit.