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CONTES POPULAIRES EN ITALIE


d’épingles qu’il leur mit sous les yeux. C’était donc bien réellement un maléfice. Quinze Jours après, l’affaire oubliée, M. di Martino vit arriver sur sa terrasse la sorcière toute pâle et qui paraissait tourmentée par un remords.

— Qu’avez-vous donc, Rita ? lui demanda-t-il.

— Ah ! monsieur, pardonnez-moi ; ç’a été un égarement, un accès de bile.

Il ne fut point facile de calmer la pauvre femme qui était peut-être dupe de la comédie qu’elle jouait.

— Mais vous ne m’avez rien fait, Rita.

— Comment, dit-elle, moi qui ai fait des vœux pour votre destruction !

Tout s’expliquait, la sorcière avait mis devant la porte un chiffon piqué d’épingles parce qu’elle voulait la mort de M. di Martino. Mais comme le mort était très-vivant et s’obstinait à douter des sortilèges, Rita voulut le convaincre et, à cet effet, se rendit le soir même, seule avec lui, sous un caroubier. Elle se leva tout à coup comme une illuminée et s’éloigna de quelques pas pour adresser une prière en vers siciliens à San Vito qui est le patron des chiens et une invocation au diable. La sorcière déclamait tout cela comme si elle y croyait, d’un air tantôt dévot, tantôt contrit et avec une aisance imperturbable.

— C’est l’oraison de San Vito, dit-elle, une prière d’attraction. Vous verrez d’ici à quelques jours pour qui je l’ai faite et quel résultat elle doit avoir.

— Mais, Rita, vous m’avez dit que j’aurai, ce soir même, touché du doigt toute la réalité de votre science.

— Mais, monsieur, je n’ai fait jusqu’ici que pré-