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Dans l’ombre d’elle-même hasardant un coup d’œil,
Y rencontre le vide et le froid du cercueil.
Sans pouvoir ressaisir dans son morne voyage
Ni les cables du port, ni les flots de l’orage,
Asseyant sa pensée aux rives du néant,
Elle en entend rouler le murmure effrayant,
Voix confuse d’un flot que nul zéphir n’annonce,
Qui n’eut jamais de borne, et n’a point de réponse.


Et ce flot redisait à mon cœur abattu :
« Tu te vantais de vivre, hélas ! te compris-tu ?
» As-tu sondé l’abîme où germe ta pensée,
» Comme l’éternité dont elle est enlacée,
» Le vent qui t’enleva des profondeurs de Dieu
» Pour te jeter vivant, à ton heure, en ton lieu ?
» Sais-tu le mot d’amour que la Toute-Puissance
» Pour t’immortaliser grava dans ton essence ?
» Sais-tu pourquoi ton ame, échappée à ses bras,
» Se ressouvient de Dieu, mais ne l’adore pas ? »


Ignorer l’avenir, est-ce là se connaître ?
Ne pouvoir ici-bas assigner à son être
De rang suprême et sûr dans le chœur des esprits…
Se savoir seulement un céleste débris,