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aussi, dont la voix, semblable à la sienne, n’est qu’un chant de regrets, et dont il a pu dire avec raison :

« Ma pensée est l’écho de sa longue souffrance,
Le deuil profond de sa beauté. »


Mais dans ses efforts il rencontre un obstacle, la tentation, Protée à mille formes, qui se trouve sur le chemin de chacun, et qui se présente à lui sous le manteau de la poésie. Il consacre à cette idée quelques-uns de ses morceaux les plus importants, entr’autres l’Alouette et le Poème des Alpes. Il est une seule chose qui ne conduise pas à un abîme de déceptions, c’est l’amour. La poésie elle-même a son vertige, et quand il en a goûté les charmes, il sent que son rêve retombe sur lui et il s’écrie :

« C’est que les cités éternelles
Aux ames fières et rebelles
Loin du monde ne s’ouvrent pas ! »

Voilà ce que nous pourrions appeler la théologie de notre poète. Elle n’est pas liée avec une rigueur dogmatique ; mais il y a une unité réelle et vivante. Cependant on se demandera encore si l’harmonie supérieure, si le ciel qu’il recherche est bien le ciel des chrétiens, ce ciel où tout s’individualise, où tout prend un nom, une forme, des couleurs ; où, quoiqu’elles s’unissent dans l’amour, il y a, selon l’expression de Jésus, des