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poésie et jusque dans les détails de son style une originalité profonde, qu’on ne peut guère comprendre que par sa physionomie morale. Les mots même qu’il affectionne sont remarquables. Il semble écouter dans le fond de son ame comme une musique intime, qu’il s’efforce de répandre sur la lyre et qu’il nomme lui-même :

« L’idéale musique en nos cœurs répandue. »

Mais parfois la lyre est trop matérielle pour ces accents célestes, et l’on sent que la corde est rebelle ; parfois aussi il en tire des notes dont il eut seul le secret.

Nous ne saurions mieux caractériser sa manière qu’en disant qu’elle a quelque chose d’éthéré. Riche de couleurs, il les répand à pleines mains ; mais ce qu’il a surtout sur sa palette, ce sont les teintes azurées, transparentes et mélancoliques. Il en résulte souvent quelque chose d’incohérent, de lâche, de maladif, comme nous disions tout à l’heure ; mais alors même on ne peut guère essayer de faire disparaître un défaut sans enlever avec lui de réelles beautés.

Son vers est ordinairement plein, la rime riche et facile : on sent la force de l’inspiration. Profond dans la pensée, il rencontre sans peine des formes heureuses et nouvelles ; il a en horreur la poésie factice, et, pour l’éviter, il serre de près la nature ; cela est surtout remarquable dans ce qui touche à