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Oh ! qui me l’apporta, cet adieu si lointain !
Est-ce le vent d’un soir ou le vent d’un matin ?

» Terre, couche glacée où mon ame se voile,
Rentre donc dans ta nuit ! j’y verrai mon étoile.
Son rayon prophétique et sa haute clarté
Aiment les cieux déserts et leur immensité…
Que me fait ici-bas le soleil qui se lève ?
Je n’y vois guères mieux, et j’y perdrais un rêve. »




Ainsi chantait un barde. Il doubla les coteaux
Parmi les peupliers frémissants sur les eaux.
C’était l’heure douteuse où la neige est d’opale,
Où, penché sur les monts, l’esprit du soir exhale
Sa nuageuse haleine au-dessus des champs bleus,
Effaçant des forêts les feuillages houleux…
L’heure où le Dieu d’amour, du ciel ouvrant les roses,
Nous entretient tout bas de la fuite des choses,
Où nos derniers amis et nos rêves joyeux
Dansent autour de nous, murmurant des adieux.
Le barde, au bord du lac, sur l’humide prairie
S’endormit, absorbé dans cette rêverie ;
Et son ame étreignant l’air mortel, mais plus pur,
S’éleva par degrés sur ses ailes d’azur.
Mais lorsqu’il fut au seuil du divin sanctuaire,