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CŒUR MAGNANIME

comme ceux qui n’ont point d’espérance ; c’est pourvoi je viens évoquer en votre cœur endolori la pensée si consolante du dogme de la communion des saints. À l’aide de cette céleste lumière, qui, semblable à un phare lumineux, éclaire les régions ténébreuses du tombeau, vous pourrez voir l’âme qui vous était si chère, et qu’aujourd’hui vous pleurez, débordante d’une vie nouvelle, de cette vraie vie qui ne commence qu’à la mort. Rodrigue est aussi près de vous, davantage même, qu’il l’était naguère. Il vous voit et il vous entend. Il n’a fait que nous devancer vers ce but suprême où nous cheminons tous. À cette heure, j’en ai la pieuse certitude, il goûte auprès de Dieu cette joie inénarrable qu’il réserve à ceux qui lui auront été fidèles. Fidèle à son Dieu, Rodrigue l’a été, je puis vous l’assurer. Si son cœur a pu sentir les atteintes de l’orage, si sa bouillante jeunesse a eu, comme tant d’autres, ses moments de faiblesse et d’égarement, je puis vous affirmer encore que le doute et l’erreur n’ont jamais effleuré son âme si profondément croyante, et qu’il a conservé intacte cette foi si robuste et si vivace, qui caractérise le peuple canadien-français.

Mais ce qui, sans doute, sera votre plus douce consolation c’est la pensée que Rodrigue a trouvé la mort dans l’exercice de la plus sublime charité. La fièvre typhoïde, qui règne en ce moment à l’état d’épidémie dans la capitale, exerce particulièrement ses ravages au quartier de Ménilmontant. Rodrigue comptait dans ce quartier de nombreux protégés qui lui avaient été confiés par la Société de Saint-Vincent de Paul, dont il était un des membres les plus dévoués. Parmi ses protégés il avait remarqué une famille, composée, outre