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CŒUR MAGNANIME

expansive que d’ordinaire, Michel faisant violence à son excessive timidité qui paralysait si souvent les élans de son cœur, lui dévoila enfin son amour et lui confia le rêve qu’il avait fait depuis longtemps de confondre leur destinée. Il ajouta : « Je ne vous demande pas de me dire à cette heure ce mot qui doit ou faire mon bonheur ou briser ma vie. Dans une question aussi grave où votre avenir et votre cœur sont en jeu, je comprends que vous ayez besoin de vous consulter vous-même. Dans huit jours seulement vous me répondrez. J’emporte, néanmoins l’espérance : il fait si bon espérer quand on aime. » lui dit-il plus bas en fixant sur elle son clair et franc regard.

Ce soir-là, en prenant congé d’elle, il garda plus longtemps et étreignit plus fort la petite main que la jeune fille lui tendait ; et les deux prunelles d’azur, qui le regardaient, exprimaient tant de confiance, qu’il quitta son angélique amie le cœur tout ensoleillé. Celui d’Anne-Marie était tout remué par l’aveu inattendu. Jamais elle n’aurait soupçonné que le jeune avocat pouvait l’aimer ; d’ailleurs, encore sous l’impression douloureuse de son amour déçu, elle s’était faite à l’idée de poursuivre seule sa route en ce monde. Les paroles de Michel, comme une clarté bienfaisante, venaient d’illuminer soudain son âme si hâtivement marquée de l’empreinte de la douleur. Elle éprouvait une joie secrète à se les redire. Tout le reste de la soirée, la douce figure de Michel Girard passa devant ses yeux, et, lorsque le sommeil vint clore ses paupières, la chère image la poursuivit encore dans son rêve.

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