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CŒUR MAGNANIME


II


Qui ne se souvient encore dans notre bonne vieille cité de l’excellent Docteur Solier, sa mémoire est impérissable. Il fut la sommité de son temps. Sa charité était à l’unisson de sa science qu’il mettait dans une égale mesure au service des riches et des pauvres. Ces derniers ne craignaient pas d’y recourir ; ils étaient si paternellement reçus ! quelques-uns en abusaient même ; mais nul ne parvenait à épuiser l’inlassable bonté de l’éminent praticien : les déshérités de la vie avaient d’ailleurs ses prédilections…

Sa douce compagne était digne de lui ; elle aussi connaissait la demeure de l’indigent, dont elle se constituait l’infatigable protectrice, elle était aimée et vénérée à l’égal de son mari.

Cet heureux couple, qui méritait à tant de titres d’être béni de Dieu, subissait depuis de longues années une bien douloureuse épreuve : il n’avait pas d’enfant ! Pour un foyer canadien il ne pouvait exister d’affliction plus grande ! On sait qu’au Canada les familles nombreuses sont la généralité ; chez ce peuple de foi, où l’esprit familial a de si profondes racines, l’enfant, dernier venu est toujours salué avec cette même joie qui accueillit un jour, à l’aurore du foyer, l’enfant premier-né.

Les pieux époux, afin de fléchir le ciel, avaient multiplié leurs largesses et, selon la touchante coutume du