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Amour ![1]


« IlFrère, un jour tu m’as dit (je crois t’entendre encore) :
« Il est des cœurs où rien n’a jamais palpité,
« Qui fiers d’être de bronze à tout ce qu’on adore,
« Croient à l’amour, mais comme à la fragilité !

« Pareils aux instruments où l’harmonie éteinte,
« Sous les doigts d’un Mozart, resterait sans frémir,
« Jamais, sous la douceur de sa divine empreinte,
« L’amour ne tira d’eux le plus faible soupir.

« Sans qu’à leur horizon un astre la colore,
« La vie à leurs regards offre assez de splendeur ;
« Sans que, sur leur chemin, une fleur vienne éclore,
« Le voyage a son charme. Oh ! tel n’est pas mon cœur.

« Car d’aimer, d’être aimé quelle soif le dévore !
« Il veut sentir l’amour voltiger dans son ciel.
« L’amour de printemps, jeune et frais comme l’aurore,
« Comme elle parfumé, plus suave qu’un miel ;

« L’amour pur se posant sur tout âme altérée.
« Comme le gai pinson sur toute branche en fleurs,
« Secouant en chantant de son aile éthérée
« Le dictame sacré de toutes les douleurs. »

  1. Cette poésie a été trouvée parmi les notes intimes d’Aimé de Montaigu. Elle fut écrite sans doute au moment de sa plus grande ferveur, alors que la vocation sacerdotale s’imposait à lui avec une force irrésistible. Nous avons cru que le lecteur goûterait ces effusions si pieusement lyriques de l’âme d’un jeune lévite, qu’il en retirerait même un accroissement d’amour pour son Dieu. Ce sera notre excuse de l’avoir insérée dans ce volume à la suite de Cœur Magnanime.